
Mains d'avenir — La voie de Shariff, chapelier chez Maison Michel

En plusieurs portraits et autant d’histoires, la série Mains d’avenir, la voie des artisans donne à voir les trajectoires, passions et réflexions de celles et ceux qui « font » l’artisanat français. Aujourd’hui, rendez-vous est pris avec Shariff, chapelier pour Maison Michel.
Shariff n’était pas destiné à devenir chapelier. Imprimeur de formation, sa découverte de la chapellerie est un heureux accident de parcours « J’ai répondu à une offre d’emploi pour remplacer un chapelier qui prenait sa retraite. Je ne savais pas du tout comment ça fonctionnait, mais il m’a tout transmis. »
Le geste, les outils, et même un fer à repasser, vieux d’un siècle et encore en service, continuent de l’accompagner au quotidien « Ce fer me suit depuis mes débuts. Je fais tout avec : nettoyer du feutre, repasser les pailles, réaliser une variété de finitions de bords de chapeaux, comme les repliés doubles… C’est mon outil favori », avoue-t-il.
Du formier au galon : le savoir-faire en héritage

Chez Maison Michel, tout commence par la forme.
« C’est le formier qui fabrique le moule en bois. Ensuite, on pose la matière dessus, feutre ou paille, on découpe, on repasse à la vapeur… Presque tout est fait à la main.»
Un travail minutieux qui peut paraître solitaire, mais s’avère pourtant être un travail d’équipe.
« La chapellerie, c’est un métier d’amour du produit. Et ce que j’aime aussi, c’est transmettre cet amour-là »
Chapeliers, modistes, formiers : chacun intervient à son étape, dans un ballet millimétré.
Des présidents et des panamas
En 37 ans de métier, Shariff a vu défiler de nombreux chapeaux… et quelques têtes célèbres.
Parmi ses souvenirs les plus marquants, les collaborations avec Monsieur Lagerfeld, les chapeaux pour la Maison-Blanche et l’inauguration du 19M par le président Emmanuel Macron. « J’ai des photos avec lui, c’est un beau souvenir », se rappelle-t-il.
Mais ce dont il est le plus fier, c’est d’avoir réussi un jour à produire 37 panamas en une seule journée : « C’était une commande urgente et j’ai réussi à tout faire dans les temps. C’est mon record. »
Petits bords, grandes histoires
Shariff a fabriqué des milliers de chapeaux au fil des ans.
Son modèle préféré ? Les petits bords, ceux qui ne gênent pas, ou les casquettes. « Surtout quand c’est moi qui les ai faites. » Chapeaux pour animaux, commandes Disney ou encore pièces pour la collection « Métiers d’art » de CHANEL : parfois, les projets qu’on lui confie sont pour le moins insolites.
Son rêve aujourd’hui ? « Créer de nouvelles formes. J’ai déjà fait beaucoup, mais j’aime l’idée de continuer à inventer. »
Transmettre la beauté du geste

Aujourd’hui, Shariff continue de partager son savoir-faire, convaincu que l’avenir du métier passe par la transmission. Il garde aussi un œil sur les nouvelles technologies et les matières à venir.
« Nous allons sûrement devoir faire face à des défis inédits, notamment avec la réglementation sur les peaux. Mais peut-être que nous trouverons de nouvelles matières, encore meilleures, encore plus belles. »
Lorsqu’il quitte l’atelier, Shariff retrouve ses enfants et ses petits-enfants, loin des galons et des plumes. Mais il sait ce qu’il a construit.
Un geste répété des milliers de fois, pour des chapeaux qui, eux, ne se ressemblent jamais tout à fait.
“Je suis fier de ce que j’ai fait et de ce que j’ai apporté à Maison Michel. 37 ans de métier, ce n’est pas rien”
Shariff, chapelier chez Maison Michel